Nous sommes un peu sonnés 🤔
Ci-dessous le message de notre avocate :
Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint la décision rendue par la Cour européenne des droits de l’homme sur notre requête. Comme vous le verrez, elle rejette malheureusement notre requête aux motifs que l’interdiction de manifestation qui vous a été opposée n’était pas disproportionnée au but légitime poursuivi.
Je vous laisse en prendre connaissance et reste à votre disposition pour toute précision.
Bon, nous voila arrivé au bout de l'acharnement judiciaire. Malheureusement, cette décision fait jurisprudence : les nudistes (de quoi se plaignent-ils ?) ont leurs espaces dédiées et ailleurs pas de salut.
Il faut revenir à la base. Banaliser, encore et encore, la nudité en milieu naturel. Aujourd'hui, nos randonues en groupe ne rencontrent pas de problèmes. Cela devient presque banal.
Plus de personnes feront bien la distinction entre nudité simple et exhibition, plus l'article 222.32 sera correctement interprété et avec le temps de plus en plus de magistrats feront la différence.
C'est ce que je craignais, et au total, cette action aura été contre-productive.
Bruno a raison: la nudité dans la nature, la nudité sur des plages sauvages, la possibilité de se baigner nu dans sa piscine sans avoir à craindre une plainte pénale, c'est la base et c'est plus facile à défendre qu'une manifestation nue en ville.
Manifester nu n’est pas un droit européen
Le verdict est tombé ce jeudi 3 octobre 2024. La Cour européenne des droits de l’Homme a rejeté la requête de l’APNEL concernant une cyclonue parisienne interdite. Il n’y aura pas de jurisprudence générale concernant cette nudité publique.
Jean-Luc Bouland

L’APNEL y croyait. Suite à l’interdiction en 2019 d’une cyclonue dans Paris, différentes actions avaient été engagées en justice, que la FFN n’avait pas voulu suivre, et l’APNEL avait continué seule jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme. « Alors que dans la plupart des démocraties, les manifestations cyclonudistes (WNBR) se déroulent sans que les états violent le droit à la liberté d’expression, la France reste « frileuse » et continue de réprimer ce type d’évènements pacifiques et revendicatifs ayant pour objet la crise climatique, la pollution et la sécurité des adeptes des modes de « déplacement doux ». Et quoi de plus symbolique que la simple nudité pour représenter cette thématique existentielle, naturelle et universelle » écrivait Sylvie Fasol, la présidente de l’APNEL, dans le communiqué de presse daté de 2023 annonçant qu’elle poursuivait son action, accompagnée par l’ouverture d’un compte de soutien participatif.
« Depuis 2019, ce ne sont pas moins de 25 cyclonues qui ont été interdites. La majorité des préfets et juges s’obstinent toujours à opposer à la nudité des participants, le délit d’exhibition sexuelle (article 222-32 du code pénal) pour brimer notre expression.
L’APNEL et ses conseillers juridiques, considèrent donc que la France viole l’article 10 de la Convention Européenne des droits de l’homme relative à la liberté d’expression. Nos juridictions se sont uniquement bornées à examiner la question de la nudité dans l’espace public, sans prendre en considération les explications fournies sur le sens donné à la nudité des manifestants », écrivait-elle.
Mais la Cour Européenne des Droits de l’Homme en a décidé autrement, et rejeté la demande, arguant de plusieurs points, dont les principaux sont que pour elle il n’y a pas « viol » de de la convention relative à la liberté d’expression, estimant implicitement qu’elle ne souhaitait pas faire ingérence en ce cas dans le droit local. Une décision que d’aucuns considèrent comme régressive par rapport à de précédents arrêts concernant l’Anglais Stephen Gough, ou, plus récemment, le droit de manifester des femen (Bouton).
Le débat n’est pas clos, mais, désormais, il sera encore plus difficile d’organiser des cyclonues (WNBR) en France…
Les joueurs de bridge qui déchirent leurs cartes et renversent la table quand ils ont perdu
Ceux de fléchettes qui les lancent agressivement, s'ils sont fâchés
Les cyclistes montant sur le trottoir
Les photographes prenant qui ne le veut pas
Les chasseurs jugeant pouvoir traquer le gibier jusqu'en centre-ville
Les motocyclistes bruyants ou se permettant tout itinéraire
Et les naturistes à qui quand on dit "N'allez pas ici", forcent le passage quand même
Tous rédigeront des pavés sur le droit qu'ils se trouvent.
Mais aucun ne sera admis par un maire ou par un préfet...
C'est du savoir vivre.
Toi et le Mouvement Naturiste, ces dernières années, nous avez lourdement endommagés.
Rendus insupportables, grossiers, vindicatifs de surcroît. Des avec qui l'on a pas envie de faire corps.
Un jour tu comprendras que le naturisme ça ne marche que si tout le monde est d'accord et content.
En particulier, que les communes où sont les manifestations naturistes soient contentes qu'elles soient là. Et il y en a...
Jamais tu n'imposeras rien.
Réussir des bras de fer, défier, n'a aucun intérêt. Ça ne nous rend pas sympathiques. Juste chiants.
Qui va nous aider après ça ? Nous apprécier ?
C'est impossible que toi et Jeff fassiez l'inverse de ce qu'il faut !
Au moins, arrêtez de nous foutre en l'air.
Nous souffrons de vos actions intempestives.
Le problème de nos cyclonues vient essentiellement de nos rangs : nous sommes très peu à être de vrais cyclistes réguliers.
Les associations cyclistes le savent car on n'est pas dans leur rang, ils ne nous connaissent pas et la preuve est que certains participants doivent louer des vélos pour participer ! Certains n'ont peut être jamais fait de vélo depuis 5 ans, voire plus.
Si nous étions plus nombreux avec une participation massive des associations cyclistes et une mise en avant moins importante de la nudité dans notre communication, le problème serait à mon sens différent car on serait plus pris au sérieux.
Faut être réaliste, on pense pour des guignols à faire du vélo nus ou à moitié nus à dix ou vingt (et je ne parle pas de ceux qui le font à cinq).
Enfin bref, la bonne nouvelle qui peut en ressortir c'est que certains donneurs de leçon en matière de droit pourront peut être la mettre en sourdine durant quelques temps....
Et écouter ceux qui connaissent le droit mieux qu'eux.
Quand on n'est pas noir ou arabe d'origine subméditerranéenne, on n'a aucune raison d'organiser des manifestations revendicatives pour protester contre le racisme.Donc quand on ne fait jamais de vélo, on n'a aucune raison d'organiser des manifestations revendicatives pour défendre la sécurité des cyclistes.
Quand on n'est pas juif, on n'a aucune raison d'organiser des manifestations revendicatives contre l'antisémitisme.
Quand on n'est pas gay ou lesbienne, on n'a aucune raison d'organiser des manifestations revendicatives contre l'homophobie.
Quand on n'est plus en activité mais retraité, on n'a aucune raison d'organiser des manifestations revendicatives syndicales.
Je vous laisse continuer avec les exemples de votre choix.
Parallèlement, durant l’examen de ce recours, l’association continue d’organiser des World Naked Bike Rides. Cependant, le 10 août 2023, le Tribunal administratif de Bordeaux a refusé de lever l’interdiction d’une manifestation de ce type prévue à Bègles, confirmant ainsi les nombreuses interdictions précédentes.
Depuis 2019, pas moins de 25 cyclonues ont été interdites en France. L’APNEL dénonce que la majorité des préfets et des juges invoquent systématiquement l’article 222-32 du code pénal sur l’exhibition sexuelle pour réprimer ce qu’elle considère comme une forme de liberté d’expression. L’association estime que ces interdictions violent l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Source : Jean-Marc Morandini
Liberté, Libertés chéries
Veille juridique sur les droits de l'homme et les libertés publiques
« La liberté, ce bien qui fait jouir des autres biens », écrivait Montesquieu. Et Tocqueville : « Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle même est fait pour servir ». Qui s’intéresse aujourd’hui à la liberté ? A celle qui ne se confond pas avec le libéralisme économique, dont on mesure combien il peut être source de prospérité mais aussi d’inégalités et de contraintes sociales ? A celle qui fonde le respect de la vie privée et la participation authentique à la vie publique ? La liberté devrait être au cœur de la démocratie et de l’Etat de droit. En même temps, elle ne peut être maintenue et garantie que par la vigilance et l’action des individus. Ils ne sauraient en être simples bénéficiaires ou rentiers, ils doivent non seulement l’exercer mais encore surveiller attentivement ses conditions d’exercice. Tâche d’autant plus nécessaire dans une période où les atteintes qui lui sont portées sont aussi insidieuses que multiples.
jeudi 3 octobre 2024
La CEDH met un frein au droit de se promener nu, à vélo
Les revendications en faveur de la reconnaissance d'une liberté nouvelle sont nombreuses et suscitent relativement souvent une évolution du droit. Du mariage pour tous au droit à l'assistance médicale à la procréation désormais ouvert aux femmes seules ou en couple, l'évolution des mœurs conduit ainsi à la création de nouvelles libertés. Toutefois, certaines revendications ne parviennent à s'imposer, et la décision de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) APNEL c. France rendue le 12 septembre 2024 marque l'échec d'un droit original, celui de de circuler nu et à vélo.
Il est vrai que les promoteurs de cette liberté sont très minoritaires, l'idée de se déshabiller pour se promener en vélo n'étant pas très répandue dans la population. Il n'empêche que l'Association pour la promotion du naturisme en liberté se montre très active dans ce domaine, s'efforçant d'organiser des World Naked Bike Rides, dont l'objet est de "faire vivre la liberté d'être nu comme expression de la fragilité humaine, de se reconnecter avec la nature et avec sa propre nature, sans honte du corps". De manière plus prosaïque, il s'agit aussi de contester le délit d'exhibition sexuelle qui permet de sanctionner les participants.
Les World Naked Rides
Le 7 juillet 2019, conformément au droit commun des manifestations, l'APNEL déclare vouloir organiser un tel rassemblement à Paris le 8 septembre suivant. A la veille de la manifestation, le préfet de police interdit la World Naked Ride, en invoquant précisément le risque que des infractions y soient commises, en particulier le délit d'exhibition sexuelle, prévu à l'article 222-32 du code pénal.
L'APNEL s'efforce en vain d'obtenir l'annulation de l'arrêté préfectoral d'interdiction devant le tribunal administratif de Paris. Le 19 juin 2020, celui-ci écarte le recours, et se fonde sur l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, selon lequel "la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui". En l'espèce, la manifestation a pour objet de contester le délit d'exhibition sexuelle en commettant l'infraction, ce qui évidemment porte atteinte à l'ordre public. Pourtant, note le juge, l'infraction d'exhibition sexuelle n'emporte qu'une atteinte très limitée au droit de pratiquer le nudisme, car elle ne l'interdit que dans des lieux ouverts à la vue du public. Dès lors, l'interdiction n'est pas constitutive d'une atteinte disproportionnée aux droits de la personne, par rapport aux nécessités de l'ordre public. Cette décision fut confirmée par la Cour administrative d'appel de Paris en 2022, et le pourvoi en cassation de l'APNEL rejeté par le Conseil d'État le 4 août 2023.
Le nudisme, élément de la liberté d'expression
L'APNEL saisit donc la CEDH, en invoquant une violation de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme qui protège la liberté d'expression. En même temps, et pendant même l'examen du recours, l'association s'efforce toujours d'organiser des World Naked Bike Rides. C'est ainsi que, dans une ordonnance de référé du Tribunal administratif de Bordeaux refuse, le 10 août 2023, de suspendre l'interdiction d'une manifestation de ce type, organisée à Bègles.
La CEDH, dans son arrêt du 12 septembre 2024, reconnait que l'arrêté d'interdiction emporte une ingérence dans la liberté d'expression. Dans une décision du 28 octobre 2014 Gough c. Royaume-Uni, elle reconnaissait déjà au requérant le droit de vouloir développer un débat public sur les bienfaits de la nudité, quand bien même il serait le seul à promouvoir une telle doctrine. Condamné plus de trente fois pour avoir affronté dénudé les rigueur du climat écossais, M. Gough avait même poussé l'action militante jusqu'à se présenter entièrement nu devant ses juges…
Le contrôle de proportionnalité
Quoi qu'il en soit, la Cour reconnaît l'ingérence, mais affirme que l'interdiction d'une telle manifestation est prévue par la loi française, puisqu'il s'agit de garantir l'ordre public en empêchant que des infractions soient commises. Concernant la proportionnalité de l'ingérence au regard de la liberté d'expression, la CEDH s'assure, comme elle le rappelle dans l'arrêt Bouton c. France du 13 octobre 2022, rendu à propos de l'exhibition d'une Femen dans l'église de la Madeleine, que son rôle se borne à s'assurer que les juges internes ont justifié l'interdiction par des motifs "pertinents et suffisants".
Précisément, l'arrêt de la CEDH Ezelin c. France du 26 avril 1991 affirme que la liberté d'exprimer ses convictions ne peut subir de limitations, sauf dans l'hypothèse où elle conduit à commettre une infraction. C'est bien le cas en l'espèce, l'élément moral était démontré par l'association elle-même qui déclare vouloir contester ce délit. De fait, la Cour estime que les juges français ont convenablement mis en balance les différents intérêts en cause, la mesure d'interdiction n'entrainant pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression.
Les cyclistes de l'APNEL n'obtiennent donc pas de la CEDH la consécration d'une nouvelle liberté de circuler nu à vélo, pas plus qu'ils ne l'avaient obtenue devant les juges internes. Ils sont désormais devant un choix cornélien. Soit ils manifestent contre le délit d'exhibition sexuelle en restant habillés, mais un nudiste rhabillé n'a guère d'intérêt médiatique. Soit ils font leur promenade dénudée à vélo dans un espace privé, à l'abri de la vue du public, mais là encore ils risquent de n'intéresser personne. Deux solutions qui ne peuvent satisfaire l'association, surtout désireuse de médiatiser sa revendication. Peut être se consolera-t-elle en pensant que la CEDH a placé ses membres à l'abri des rhumes de cerveau et autres virus saisonniers ?
Les manifestations organisées par des associations cyclistes existent bien. Ça s'appelle des vélorutions et s'organisent à peu près dans chaque ville tous les vendredis. A Marseille, ils sont régulièrement une bonne cinquantaine à circuler à chaque manifestation.
Il y a quelques années, j'avais eu vent d'une action de "vélorution" à Paris, devant le palais des expositions, en marge d'un salon de l'auto. Le projet était de rouler nu à vélo devant l'entrée et je m'y étais rendu avec mon vélo. Bien sûr nous avons été accueillis par des flics qui nous l'ont interdit, puis après négociation ont accepté que nous soyons "statiques". Nous nous sommes mis en rond devant l'entrée, nous étions une vingtaine, entourés d'un cordon de policiers plus nombreux que nous...
À un signal nous nous sommes déshabillés, certains nus (comme moi) d'autres avec des strings ou des cache-sexe en forme de selle à vélo, en agitant nos vélos au dessus de nos têtes... Puis nous nous sommes dispersés, j'ai tenté de le faire mais les flics ont retenu les 4 ou 5 qui avaient été complètement nus, dont votre serviteur.
Un responsable des flics est resté ensuite quelques minutes au téléphone pour savoir ce qu'on allait faire de nous, j'avoue qu'à ce moment je n'en menais pas large... Puis on nous a laissé partir sans relever nos identités.
Cette anecdote suggère qu'en effet il serait souhaitable pour les actions futures de nous coordonner avec ce mouvement composé principalement de jeunes.
| Titre : | Arrêt relatif à l'interdiction d'une manifestation avec port de vêtement facultatif : Apnel c. France |
| Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
| Type de document : | Jurisprudences |
| Année de publication : | 03/10/2024 |
| Numéro de décision ou d'affaire : | 42156/23 |
| Langues: | Français |
| Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Liberté d'expression [Mots-clés] Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) [Mots-clés] Infraction [Mots-clés] Manifestation |
| Résumé : | La requête concerne l’interdiction d’une manifestation avec port de vêtement facultatif organisée par l’association pour la promotion du naturisme en liberté (Apnel), dont l’objet est d’« œuvrer pour que soit modifié l’article 222-32 du code pénal français afin que la simple nudité ne soit pas assimilée à de l’exhibition sexuelle ». Sous l’angle de l’article 10 de la Convention, l’association requérante soutient que l’interdiction qui lui a été opposée a porté une atteinte disproportionnée à son droit à la liberté d’expression.
La Cour conclut que "l'interdiction de manifestation opposée à l'association requérante n'était pas disproportionnée au but légitime poursuivi et, partant, que le grief tiré de l'article 10 de la Convention est manifestement mal fondé" et déclare la requête irrecevable. |
| Thématique Bulletin documentaire PDF : | Droits - Libertés |
| En ligne : | https://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-237433 |


